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YVETTE PROST

Il faut battre le fer pendant qu’il est chaud ; le jour même, Diane partait pour Toulon et y prenait le tramway qui conduit au Mourillon. Elle se sentait en dispositions optimistes : comme il suffit d’une espérance infime pour nous remettre en selle !

Le tramway traversait un quartier populeux, aux vieilles maisons noires. La jeune femme s’amusait du va-et-vient des passants, où dominaient les soldats de l’armée coloniale et les petits cols bleus.

Comme elle levait machinalement les yeux sur la haute façade d’une maison, elle eut un soubresaut, étouffa une exclamation… Ce qu’elle venait de voir était tellement inattendu, inouï, incroyable, qu’elle en fut, pendant quelques secondes, comme sidérée. Puis, se levant de sa banquette, elle gagna la plate-forme, descendit à la première halte et revint sur ses pas : il fallait retrouver la maison où elle avait fait la découverte bouleversante. Elle la reconnut sans peine. C’était un café-hôtel de douzième ordre, dont elle nota soigneusement le nom et le numéro ; puis elle remonta jusqu’à l’entrée de la rue pour voir la plaque indicatrice. Après quoi, Diane se sentit dans un si fol état de nervosité qu’elle remit au lendemain sa visite et vint échouer dans un café de la rade où elle se fit servir une tasse de thé.

La découverte stupéfiante qu’elle venait de faire pourrait être un explosif mortel entre des mains haineuses… Diane n’en ferait pas usage… Certainement non, elle n’en ferait rien. Mais quelle secrète ivresse de savoir ! Quelle voluptueuse vengeance !


Immobile derrière une vitre de la véranda. Blanche semblait regarder tomber le soir. En réalité, elle