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L’abbé Paulhé est prêtre : mais, au début de son ministère, il se trouve en présence des événements de 93. Confesseur de la foi au milieu de son troupeau, il tient tête à l’orage ; mais il faut céder : bientôt réduit à fuir, à se cacher pour échapper à la persécution, il accepte les chaînes plutôt que de se laisser ébranler, et de présenter le spectacle d’une honteuse et criminelle défection. Enfermé avec tant d’autres victimes de la fureur révolutionnaire, d’abord à la chartreuse de Saïx, ensuite à l’île de Rhé, il ne fut rendu à la liberté qu’après la chute de Robespierre. Lorsque le calme se fut un peu rétabli, le vertueux Paulhé qui, dans sa profonde humilité, n’abordait le ministère paroissial qu’avec un saint effroi, ouvrit à la Fage une petite école. Voilà l’origine de cette célèbre institution qui a jeté un si vif éclat, et rendu de si nombreux et si importants services.

L’abbé Paulhé accueille d’abord quelques enfants pauvres dans une habitation isolée, au milieu d’une espèce de solitude, au centre d’une contrée sévère, presque sauvage ; et les élèves arrivent par centaines. Ils se pressent dans les bâtiments qui forment l’habitation de la famille, dans ceux qui servent à l’exploitation de la ferme. Granges, bergerie, tout est envahi. Les lits sont enlevés tous les matins pour laisser le local libre pour les classes. 300 élèves sont distribués dans ces bâtiments qui n’ont subi qu’une légère transformation ; car l’abbé Paulhé n’écoutant que les mouvements de la charité qui l’anime, réserve ses petits bénéfices pour aider les familles pauvres dont les enfants lui sont présentés. Il se ferait un crime de tarir cette source, pour satisfaire sa vanité, en élevant de vastes constructions, ou en les appropriant avec quelque luxe.

Les élèves de la Fage se rappellent cette grange, cette bergerie où, sur des bancs à peine solides, viennent s’asseoir côte à côte, et l’élève et le professeur ; ils sont fiers