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l’égout passant dans la rue de Crimée. De cette façon la conduite existant entre la rue de Crimée et le regard du Chaudron est devenue inutile, de même par conséquent que le regard des Marais, qui n’avait été établi que pour surveiller la conduite.

La délégation de la 1re Sous-commission a constaté en effet que la cuve du regard des Marais est tout à fait inutilisée et que les tuyaux ne reçoivent plus d’eau depuis longtemps. En conséquence, le regard n’étant plus en service et n’ayant aucun caractère méritant sa conservation, le dérasement peut en être autorisé, en maintenant toutefois sur l’immeuble la servitude imprescriptible de la Ville, à cause du passage dans la même-propriété de la pierrée des Mignottes qui ne peut être abandonnée, à cause de la sécurité du sous-sol.

Toutefois, la 1re Sous-commission renouvelle le vœu qu’elle avait émis lors d’une visite du regard, des Marais en 1898 au sujet du placement à Carnavalet de la curieuse et massive serrure de la porte d’entrée. La plupart des serrures des regards sont pourvues de secrets ingénieux ; elles sont toutes énormes et solidement établies : c’est qu’elles devaient résister aux tentatives des voleurs d’eau et des voleurs de tuyaux. Et ce n’était pas une mince affaire, car les regards étaient à cette époque en pleins champs et les entreprises faites contre eux étaient fréquentes. La police suburbaine était impuissante à arrêter les voleurs et à découvrir les receleurs ; lorsqu’il ne s’agissait que de l’eau du public, le mal était évidemment regrettable, ’mais ne. causait qu’une émotion relative ; il n’en allait pas de même lorsqu’il s’agissait de la conduite d’eau d’une communauté, l’on faisait intervenir les foudres célestes sous la forme de monitoires allant jusqu’à menacer de l’excommunication, non seulement les voleurs et leurs complices, mais encore les personnes ayant connaissance des larcins.

Belgrand a retrouvé l’un de ces anciens monitoires lancé à l’occasion du vol des tuyaux jet du bassin du regard des Dames-de-la-Roquette.

Voici les parties saillantes de ce curieux document :

MONITOIRE

Officialis Parisensis omnibus Rectoribus et Vicariis seu in eorum recusationem omnibus presbyteriis et notariis subditis salutem in domino. Nous vous mandons de bien et diligemment admonester de nostre part et autorité sous peine d’excommunication par trois dimanches consécutifs es prosnes de vos esglises paroissialles, comme par la teneur des présentes, veu… Tous ceux et celles qui scavent que certains quidams s’estans transportez au regard de la Roquette, sceis dans les vignes de Belleville qui receoit des eaues publiques de lade ville auraient forcé en trois endroicts et rompu le cachet qui estait à la porte dudit regard… Scavent les noms, surnoms, demeures et qualités desde quidams, leurs complices, malfaicteurs et adherans, où les choses susdictes ont été transportées, par qui et chez qui, que peut estre devenu la cuvette et thuyaux de plomb, où ils peuvent être présentement en tout ou partie, ceux qui ont acheté led plomb et barres de fer en partie et combien… Ils ayent à venir à révélations… dans six jours après la troisième publication des présentes au publicateur d’icelles, autrement nous userons à l’encontre d’eux des censures ecclésiastiques et selon la forme de droict, nous nous servirons de la peyne d’excommunication (2 juillet 1691).


Mais les menaces de l’Église n’avaient pas plus de succès que celles de la police et la sécurité des regards ne dépendait en résumé que de la solidité des portes et de la résistance des serrures.

La 1re Sous-commission présente les conclusions suivantes :

1° Avis favorable au dérasement du regard des Marais, avec maintien de la servitude, comme il a été opéré déjà, notamment pour le regard Beaufils ;

2° Réserve de la serrure du regard, pour le musée Carnavalet.

3° Prise d’une vue photographique représentant le regard des Marais émergeant du sol.

Ces conclusions sont adoptées.


18. — Entretien des regards de Belleville.



M. Tesson, au nom de la 1re Sous-commission, dit que la délégation qui a été voir l’état du regard des Marais dont il vient d’être question et qui se composait de MM. Landrin, Mareuse, Tourneux, Normand, Augé de Lassus et Tesson, a profité de sa présence à Belleville pour visiter quelques-uns des anciens regards. Son attention a été particulièrement attirée par le mauvais état du regard Saint-Martin, rue des Cascades, qui périclite et tombera en ruines si l’on n’y fait pas au plus tôt les consolidations indispensables.

Cet édicule est classé comme monument historique ; il porte deux inscriptions des plus intéressantes pour l’histoire de Paris et a con-