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M. John Labusquière répond que, l’opinion publique ayant été saisie de l’affaire par les journaux, il ne faudrait pas trop avoir l’air de restreindre l’investigation. Il demande donc que la faculté d’y assister soit laissée aux membres de la Commission tout entière du Vieux Paris.

M. Adrien Veber appuie la proposition de M. John Labusquière.

M. Georges Montorgueil dit que l’on veut surtout éviter les badauds, toujours trop nombreux en des circonstances semblables. Il ajoute que la présence des membres de la Commission à cette cérémonie ne saurait être mal interprétée.

M. Louis Lucipia pense qu’il serait également convenable d’y inviter M. de Ricaudy, promoteur de ces recherches.

La Commission décide que la famille de Turgot, les membres de la Commisssion du Vieux Paris, les représentants de MM. les préfets de la Seine et de Police, de M. le directeur de l’Assistance publique et M. Ricaudy seront avisés.


17. — Rapport de M. Guillemet sur le mauvais état d’un tableau de Corot placé dans l’église Saint-Nicolas-du Chardonnet.

M. Guillemet donne lecture du rapport suivant :

« Messieurs,

Sur l’invitation qui leur en avait été faite par le président de la Commission du Vieux Paris, préfet de la Seine, MM. Georges Cain, conservateur du musée Carnavalet, et Antoine Guillemet, membre de la Commission, se sont rendus le 1er février à l’église Saint-Nicolas du-Chardonnet afin de voir le tableau de Corot dont il avait été question à la dernière réunion de la Commission du Vieux Paris.

Ce tableau, qui représente le baptême du Christ, figure dans la chapelle des fonts baptismaux et mesure 3 m. 90 c. de hauteur sur 2 m. 10 c. de largeur ; il est des plus importants et des plus rares dans l’œuvre du maître, vu la belle ordonnance de la composition et la dimension des figures.

Il est en assez mauvais état, et il serait
indispensable de l’enlever au plus vite de la place qu’il occupe ; car, non seulement cette œuvre est perdue pour les admirateurs du maître, dans cette chapelle sombre où l’on ne pénètre que rarement, mais une restauration prompte s’impose, sinon elle sera détruite par l’humidité et le manque de soins, et elle subira le sort d’un autre Baptême du Christ, de Restout, qui figure dans la même église et est dans un état déplorable.

Ne serait-il pas désirable de voir figurer dans le Musée de la ville de Paris, qui ne possède aucun Corot, un tableau de cette qualité et de cette importance et, nous ne saurions trop le répéter, si rare dans l’œuvre du maître ?

Il nous semble donc que cette toile pourrait être reprise par la ville de Paris pour y figurer dans ses collections à côté de tant de belles œuvres de maîtres.

Dans ce cas, la Ville pourrait en commander une copie qui remplacerait l’original.

Quant aux raisons de droit qui nous semblent militer en faveur de cette reprise, nous nous appuyons sur les arguments suivants :

Que le Baptême du Christ a été commandé par la ville de Paris en 1845 (prix 3,000 fr.).

L’artiste a donc été payé sur les fonds de la Ville, et non sur le budget de la fabrique de l’église.

C’est donc une simple affectation que la Ville en a faite quand elle a accordé à l’église Saint-Nicolas que le tableau fût appendu dans une de ses chapelles. Nul doute que cette affectation ne soit toujours révocable, surtout lorsque, comme elle en a le droit et le devoir (loi du 5 avril 1884), l’Administration communale a constaté des négligences dans les soins qui doivent être apportés dans la conservation des objets.

Différents jugements viennent à l’appui de cette thèse : jugement du 29 juin 1877 faisant rentrer la Ville en la possession des tapisseries de l’église Saint-Gervais (tapisseries qui figurent au musée Galliéra) ; puis un autre jugement du tribunal de Grenoble retirant à l’église de cette ville un Delacroix pour le faire figurer au musée de la ville.

Il nous semble, Messieurs, que la Commission du Vieux Paris a le devoir de protéger par tous les moyens la conservation de tant de merveilles qui servent et racontent la gloire de notre vieille et chère cité.


Signé : A. Guillemet. »