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susceptibles d’être ainsi réédifiés peuvent encore être retenus par la Ville ; un magasin d’assez grande dimension sera donc nécessaire pour le remisage de ces objets avant leur utilisation.

M. Lucien Lambeau répond qu’il croit savoir que la Direction d’Architecture et le service des Beaux-arts seraient disposés à céder une partie de la cour des magasins d’Auteuil, cour dans laquelle il serait peut-être possible d’élever un hangar.

M. le Président estime qu’il devra être bien entendu que le magasin en question sera à l’entière disposition de la Commission du Vieux Paris. Il propose de saisir l’Administration de la question, avec prière de rechercher soit un magasin tout aménagé, soit d’étudier le projet de construction d’un hangar dans la cour du magasin d’Auteuil.

Cette proposition est adoptée.

M. Charles Sellier ajoute que la question de l’aménagement d’un nouveau local, destiné à recevoir provisoirement les objets réservés dans les démolitions exécutées après expropriation, s’impose d’autant plus que les magasins de Carnavalet n’y peuvent plus suffire. Après y avoir déposé les pierres du fronton de l’hôtel du Luart de la rue de Varenne, qui est en cours de démolition, il ne restera plus le moindre coin disponible. Que fera-t-on à l’avenir de ces intéressantes épaves des siècles passés que chaque jour le Paris moderne repousse si dédaigneusement ? Où logera-t-on, par exemple, le poteau cornier si remarquable du coin de la rue Saint-Denis et de la rue des Prêcheurs, en attendant que l’architecte appelé à construire les annexes de Carnavalet puisse l’y utiliser ? La maison qu’il décore actuellement doit être expropriée incessamment, si elle ne l’est déjà, et sa démolition est imminente.

De toutes les maisons qui restent du vieux Paris, cette maison est certainement une des plus curieuses, non pas au point de vue des souvenirs, nous ne lui en connaissons pas qui intéressent l’histoire générale ou particulière de Paris ; non pas davantage au point de vue architectural, mais par sa décoration : un arbre de Jessé sculpté en bois sur une encoignure, motif de décoration autrefois fréquemment employé, et dont celui-ci est le dernier vestige, au moins à Paris. On voit encore des poteaux corniers de ce genre, bien travaillés, dans certaines maisons de Rouen, de Chartres, de Beauvais, de Sens, de Reims, d’Angers, d’Orléans.

La maison de la rue Saint-Denis est relativement moderne, mais elle a conservé son arbre de Jessé, qui lui donne un cachet d’originalité incontestable. Le sujet de cette ornementation, qui a été souvent reproduit dans les verrières des cathédrales et dans les églises, représente l’ascendance de Jésus-Christ, à partir de Jessé, père du roi David. Pour dresser cet arbre généalogique, on a imaginé une souche qui semble prendre sa racine dans le sein de Jessé et dont les branches portent, comme fleurs ou fruits, les autres ascendants du Christ. Le sommet est occupé par la Vierge portant l’enfant Jésus.

Si mutilé par les injures du temps et la main des hommes que paraisse à présent ce vénérable spécimen de charpenterie décorative à la fin du xve siècle, il n’en est pas moins resté digne de la sollicitude des archéologues. Aussi M. Lamouroux a-t-il bien fait, en appelant, il y a déjà deux ans, l’attention du Conseil municipal en faveur de sa conservation. En prévision de l’expropriation dont la maison était menacée pour les besoins de la voirie et de la circulation, il fut alors décidé de faire prendre au moment de sa démolition toutes les mesures de précautions utiles, afin d’assurer la sauvegarde de cet arbre de Jessé, dont le musée Carnavalet doit désormais assurer l’abri.

M. Charles Sellier vient donc rappeler cette décision qu’il est temps de mettre à profit, en invitant le service compétent à prescrire toutes réserves et conditions nécessaires au cahier des charges de l’adjudication de démolition dont la maison en question va être incessamment l’objet.

Cette proposition est adoptée.


Rapport sur l’aqueduc de Belleville.


M. Tesson. — La Commission du Vieux Paris a été amenée déjà à s’occuper du régime des anciennes eaux de Paris, et plus particulièrement de l’aqueduc de Belleville et des regards qui le desservaient. L’on a été vivement surpris en constatant la destruction et l’abandon de plusieurs parties de ces remarquables travaux. Au moment où l’on signalait les traces d’un ancien regard, retrouvées rue des Couronnes, l’on apprenait la suppression du regard Beaufils et la cession à des propriétaires riverains de portions de l’aqueduc. Aujourd’hui, l’on demande à la Commission du Vieux Paris de donner un avis sur un projet tendant à raser ou tout au moins à dépla-