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Pélagie, en dehors de mes souvenirs personnels ou de ceux de mes amis, cependant il est piquant de rappeler qu’au lendemain du premier Empire, si l’on vit un peu de justice à Sainte-Pélagie, c’est à l’Empereur de Russie qu’on le dut. Pour se montrer un peu moins sauvage que Napoléon, il fit sortir de Sainte-Pélagie soixante-neuf détenus politiques, tous innocents naturellement.

Ceci se passait en 1814. Mais ce qui est non moins piquant, c’est que le même empereur de Russie y faisait enfermer l’année suivante, pour son compte cette fois, cent quatre-vingt-douze Polonais ou patriotes russes, tous aussi innocents que les pauvres diables enfermés auparavant par Napoléon.

Chassez le naturel, il revient au galop, grattez l’empereur russe, dessous il y a le cosaque ; heureusement que depuis les choses ont changé, dit-on !

On pense bien que je ne veux, ni ne puis citer ici tous les hommes célèbres, tous les martyrs de la pensée, tous les défenseurs du droit, de la justice et de la liberté qui ont plus ou moins villégiaturé de force à Sainte-Pélagie ; je me contenterai de citer ceux que j’ai plus ou moins connus personnellement depuis la fin de l’Empire : Blanqui, le plus grand de tous et sur lequel je reviendrai tout à l’heure, ainsi que sur Vermorel ; Vacherot mort l’année dernière membre de l’Académie des Sciences morales et politiques ; Tridon, Germain Casse, Scheurer-Kestner, admirable caractère