Page:Pour lire en traîneau - nouvelles entraînantes.pdf/296

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 266 —

encore de longues années, de se rencontrer tous les jours, à l’heure de l’apéritif sur le coup de six heures — on est méthodique en province — au café de la Poste, pour y tenir toujours la même conversation à peine modifiée par l’état du temps ou par les nouvelles sensationnelles du moment.

À tout seigneur tout honneur : voici le colonel du 10e chasseurs, mettons du 20e si vous voulez, qui arrive brusquement avec sa moustache blanche, le teint coloré, classique et toujours sa cravache à la main ; il est bientôt suivi du premier adjoint au maire de la ville qui vit de ses rentes et fréquente dans le monde des officiers ; il voit le colonel presque toujours de son avis, parce qu’en général il lui offre ses consommations.

Tout rond, bon garçon, voici le capitaine Circuit, bientôt suivi de tout le menu et bruyant fretin des lieutenants et sous-lieutenants de la garnison, dont je ne retiendrai que le lieutenant baron Filjup, parce qu’il était tout à la fois le benjamin et le souffre douleur du colonel. Qui aime bien, châtie bien, dit un vieux proverbe ; cette fois on aurait pu dire : qui aime bien, eng… bien. Oui, parfaitement.

Enfin, mes personnages ainsi campés, le dernier coup de six heures est à peine sonné à l’horloge de la gare, que voilà tous les habitués de l’apéritif qui arrivent, sauf trois qui y sont déjà depuis quelque temps et qui terminent une partie de billard.

On arrive même vite, car il fait un temps de