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xxiv
préface


Tu vois autour de toi, dans la nature entière,
Les siècles entasser poussière sur poussière,
Et le temps, d’un seul pas confondant ton orgueil,
De tout ce qu’il produit devenir le cercueil.
Et l’homme, et l’homme seul ! Ô sublime folie !
Au fond de son tombeau croit retrouver la vie,
Et, dans le tourbillon au néant emporté,
Abattu par le temps, rêve l’éternité !…
Qu’un autre vous réponde, ô sages de la terre :
Laissez moi mon erreur ; j’aime, il faut que j’espère.
Notre faible raison se trouble et se confond.
Oui, la raison se tait ; mais l’instinct vous répond.
Pour moi, quand je verrais, dans les célestes plaines,
Les astres s’écartant de leurs routes certaines,
Dans les champs de l’éther l’un par l’autre heurtés,
Parcourir au hasard les cieux épouvantés ;
Quand j’entendrais gémir et se briser la terre ;
Quand je verrais son globe errant et solitaire,
Flottant loin des soleils, pleurant l’homme détruit,
Se perdre dans les champs de l’éternelle nuit ;
Et quand, dernier témoin de ces scènes funèbres,
Entouré du chaos, de la mort, des ténèbres
Seul je serais debout ; seul, malgré mon effroi,
Être infaillible et bon, j’espèrerais en toi,
Et, certain du retour de l’éternelle aurore,
Sur les mondes détruits je t’attendrais encore !


« Nous n’avons pas besoin de dire que ces grands sentiments, dont personne ne peut entendre la magnifique expression sans une émotion réelle, n’affaiblissent en rien les arguments que nous avons développés. C’est par le raisonnement seul qu’on arrive à la vérité ; le sentiment touche, émeut, mais il ne peut convaincre. »

Après ces lignes de Pierre Larousse qui fut, comme Maurice Lachâtre, un des plus puissants et des plus honnêtes vulgarisateurs de son temps,