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rable que de se faire assassin, c’est tout bêtement de se faire assassiner.

Je sais bien qu’en général on ne le recherche pas ; mais ce n’est jamais qu’un moment à passer, sans compter que, par la suite, ça sert énormément à votre famille.

Voyez, Baudin est célèbre, il a une statue, tandis que les représentants du peuple qui étaient avec lui et qui n’ont pas eu la veine d’être tués, Brillier, Bruckner, Dulac, de Flotte, Maigne, Malordier, sont complètement inconnus. Seul ce brave Schœlcher est connu à cause de l’abolition de l’esclavage.

Eh bien, franchement, aujourd’hui que tous ces braves gens là sont morts, croyez-vous pas que, eux et leurs familles, ont le droit de se montrer jaloux de ce veinard de Baudin qui pour vingt-cinq francs a trouvé le moyen de devenir célèbre et de faire de son neveu un ministre ! c’est épatant tout de même comme il y a des gens qui ont de la chance !

C’est tout à fait l’histoire de ce pauvre président Carnot qui, certes, n’avait mérité ni cet excès d’honneur, ni cette indignité.

J’avais l’honneur de le connaître un peu personnellement et si je parle ici de sa fin tragique, ce n’est qu’avec un profond sentiment de respect et je dirai de douleur ; mais enfin, il est bien certain que s’il n’avait pas eu le triste honneur de tomber sous le poignard d’un assassin imbécile, il n’aurait pas aujourd’hui quinze ou vingt statues en