yeux lucides ne peuvent rien déchiffrer. Où est mon secrétaire en chef ? »
Un jeune garçon, en uniforme de caporal, s’approcha en courant de Pougatcheff. « Lis à haute voix », lui dit l’usurpateur en lui présentant le papier. J’étais extrêmement curieux de savoir à quel propos mon menin s’était avisé d’écrire à Pougatcheff. Le secrétaire en chef se mit à épeler d’une voix retentissante ce qui va suivre :
« Deux robes de chambre, l’une en percale, l’autre en soie rayée : six roubles.
– Qu’est-ce que cela veut dire ? interrompit Pougatcheff en fronçant le sourcil.
– Ordonne de lire plus loin », répondit Savéliitch avec un calme parfait.
Le secrétaire en chef continua sa lecture :
« Un uniforme en fin drap vert : sept roubles.
« Un pantalon de drap blanc : cinq roubles.
« Deux chemises de toile de Hollande, avec des manchettes : dix roubles.
« Une cassette avec un service à thé : deux roubles et demi.
– Qu’est-ce que toute cette bêtise ? s’écria Pougatcheff. Que me font ces cassettes à thé et ces pantalons avec des manchettes ? »
Savéliitch se nettoya la voix en toussant, et se mit à expliquer la chose : « Cela, mon père, daigne comprendre que c’est la note du bien de mon maître emporté par les scélérats.
– Quels scélérats ? demanda Pougatcheff d’un air terrible.
– Pardon, la langue m’a tourné, répondit Savéliitch ; pour des scélérats, non, ce ne sont pas des scélérats ; mais cependant