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Peter McLeod

prêtant leurs raquettes pendant que le vieux Bill McLaren, le “cook”, préparait des provisions.

« Les autres, attendez-nous demain soir, » ajouta Fred Dufour… À nous deux Tommy Smith !

Et les deux groupes s’élancèrent dans les deux directions indiquées par Fred Dufour…

Cette partie du territoire de l’ancien Domaine du Roi qu’arrose le Saguenay, de Chicoutimi à Tadoussac, est terriblement accidentée. Elle présente un paysage d’une sauvagerie sans nom. Une chaîne de monts hérissés se poussent les uns sur les autres. De monstrueuses rocailles surplombent des gorges sans fonds où semblent régner des tempêtes éternelles. À la longue, on dirait que tout, ici, a été calculé pour produire sur l’humain qui affronte ce coin de nature une sorte d’horreur qui pèse de tout son poids sur lui. Rien de la majesté de ces grands paysages qui élèvent, au moins pendant quelque temps, la pensée et l’imagination. Le tableau manque d’harmonie, dirait-on, et l’esprit ne se complaît pas constamment à son niveau. On attend avec fièvre quelque chose de plus divers. On voudrait sentir quelques caresses, voir des couleurs variées, quelques teintes nouvelles. On étouffe à la fin dans cette sauvagerie et on souhaite à tout instant de reposer quelque part sa vue fatiguée de cette scène continuelle de pics et de rochers, de gorges saisissantes de profondeur, de falaises nues, âpres, sèches ; rocailles froides et impassibles qui se dressent perpendiculairement jusqu’à leur sommet où ils se courbent comme pour regarder un gouffre qui rugit à leurs pieds…

La fatigue et l’inquiétude de cheminer à travers cet