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Peter McLeod

vinaigre, de vin de bleuets et d’autres bonnes choses qui moussent dans les gros verres à facettes.

Les hommes guettent les plats, préoccupés de vider leurs assiettes le plus tôt possible. Il y en a qui semblent avoir constamment deux aunes de boyaux vides.

D’un bout de la salle à l’autre on s’interpelle. Jean Gauthier, hôte généreux et pas regardant, incite les invités à ne pas manger du bout des dents. S’il restait quelque chose sur la table, ce serait lui faire affront… D’être venu au monde cela crée des devoirs. On opine du bonnet et on s’en lèche les doigts et le pouce. Alors on veut en reprendre : morceau avalé n’a plus de goût. Et l’on redouble d’efforts. Les faces, pourtant cuites et recuites au soleil, se congestionnent et deviennent plus rouges encore… Mais, n’importe, il doit y avoir place pour ce morceau de pâté aux pommes séchées…

Le soir maintenant entrait dans la pièce comme chez lui, avec ses étoiles, avec son odeur de bois mouillé fraîchement scié…

Peter McLeod est à la place d’honneur à côté des mariés. Lui aussi a un bon coup de fourchette. Il cause néanmoins et plaisante avec les femmes, houspille les hommes, les injurie au besoin… Il fait remarquer à sa voisine que la figure du père Joe Morin semble reliée en peau de cochon mangée par les souris mais que ça doit résister quand même à tous les temps. Et le père Morin, indifférent, avale comme une mécanique, ne faisant de pauses que pour at-