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LE FRANÇAIS

qu’il racontait, des récits de mœurs qu’il se plaisait à faire, Jacques Duval était devenu le roi de toutes les veillées de la paroisse. Les jeunesses de Ville-Marie ne pouvaient organiser ni un pique-nique, ni une veillée, ni une excursion à Kipawa ou aux Quinze, ou à Haileybury, que Jacques Duval ne fut de la partie. Il possédait des talents de société qui en faisaient la coqueluche de toutes les jeunes filles de la paroisse et des villages circonvoisins ; sa réputation s’étendait de Fabre à Témiscamingue-Nord. Outre qu’il savait toutes les danses américaines à la mode, pas un ne pouvait, comme lui, « caller » un quadrille, un lancier ou toute autre danse carrée. Il savait même toucher l’harmonium aussi bien que l’institutrice de l’école modèle du village qui était organiste à l’église, et il chantait des chansons comiques et des romances à la mode de façon à lui conquérir tous les cœurs. Il excellait à dire des compliments aux jeunes filles. Il avait eu un joli succès, un soir, dans une veillée des Fêtes, au village, quand il avait demandé à la jeune fille du maire : Mademoiselle, préférez-vous que je vous dise : vos beaux yeux me font mourir d’amour, ou bien ; d’amour, vos beaux yeux me font mourir ? » On parla longtemps dans la paroisse de ce trait d’esprit probablement importé de Montréal, et des jeunes filles, dans la suite, ne rêvèrent plus que de faire d’amour mourir Jacques Duval…

Mais ces jolis talents de société ne contribuaient guère à attacher Jacques Duval à la terre qui demande moins de souplesse apte aux manifestations chorégra-