Page:Potvin - Le Français, 1925.djvu/338

Cette page a été validée par deux contributeurs.
324
LE FRANÇAIS

amour pour Marguerite Morel, au profit de son caprice, donnait à ce dernier comme une force qui repoussait tout espoir de retour.

Autant que son ami André Duval, Jean-Baptiste Morel, on le pense bien fut peiné du départ définitif de Jacques.

Encore qu’il eut en ces derniers temps, considérablement modifié ses projets à l’endroit du fils d’André, il n’en conservait pas moins au fond du cœur l’espoir secret que tout finirait par s’arranger selon ses vœux. Par une cruelle ironie du sort, ce fut encore M. Larivé qui lui apprit la nouvelle du départ subit du fils d’André Duval. Un matin, Jean-Baptiste Morel était à réparer un bout de clôture, près du chemin, quand il entendit le vrombissement sonore d’une automobile qui stoppa bruyamment près de lui ; d’en-dessous de la capote, il entendit aussitôt la voix de son riche voisin :

« Eh ! comment ça va, ce matin, M. Morel ? »

«  Bien, bien, M. Larivé, et vous ? » fit de sa voix traînante, Jean-Baptiste Morel, se redressant.

— Un beau temps, hein ?

— Oui ; il va faire chaud. Les chemins sont beaux ?…

— Magnifiques, M. Morel. J’arrive de Guigues tout d’une traite. J’ai arrêté seulement, en chemin, au Rang Trois, chez André Duval pour acheter du blé de semence, on m’avait dit qu’il en avait de reste… Savez-vous, M. Morel, que j’ai encore une pièce à semer ?… Ce pauvre André Duval, je vous assure qu’il faisait pitié, ce matin…