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LE FRANÇAIS

— Pour moi, cela veut le dire, Jacques ; tu connais depuis longtemps mes sentiments, mes goûts et tu sais que j’aime profondément la terre, la terre de chez nous que je ne laisserai jamais, jamais quand même je serais obligée de la cultiver moi-même. Tu ne l’aimes pas, toi, alors, tu vas la quitter… Pourquoi as-tu pensé à moi ?…

— Je pensais, Marguerite que t’avais réfléchi à ce que je te disais, l’automne passé, en montant ensemble au Rang, l’après-midi de la Toussaint ; je pensais que pendant l’hiver t’allais finir par te « tanner » de ta vie ennuyante dans une maison vide et sur une terre gelée et dure ; je pensais que t’allais finir par décider ton père à vendre sa terre à M. Larivé qui lui donnerait son pesant d’or, ce qui lui permettrait de se reposer enfin en s’établissant au village ou en… s’en venant… avec nous autres pour vivre une belle vie tranquille, sans autre tracas.

— Tu as mal pensé, Jacques.

«…Non, vois-tu, » continua le fils d’André Duval, passant outre à la remarque de Marguerite, « l’automne passé, j’étais décidé de m’en aller ; mais si j’avais passé un hiver plus agréable, je sais pas… on sait jamais ce qui peut arriver. Mais encore une fois, j’en ai trop enduré, cet hiver, dans ces maudits chantiers où j’ai manqué mourir d’ennui et aussi de misère… Tu sais ce qui est arrivé. Pendant la maladie que j’ai attrapée à Fabre où j’ai été si proche de mourir, avec Charlie Castonguay, et quand on m’a ramené ici, ensuite, j’ai juré que je m’en irais à l’été… Bon-