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LE FRANÇAIS

peine de vous asseoir, M. Larivé ; est-ce qu’il neige encore, là ?… »

— Non, il fait beau et le temps est assez doux ; j’espère bien que nous en avons fini avec cette neige. Pensez-vous, M. Morel, que nous avons eu, un rude hiver ?… Tiens, bonsoir, Melle Marguerite… bonsoir, M. Lambert… excusez-moi, je ne vous avais pas vu en entrant à cause de la lumière de la lampe… Savez-vous que c’est la même chose à Montréal où je me trouvais voilà trois jours ; les rues sont encore pleines de neige, et vous pensez qu’un hiver comme ça a coûté cher à la municipalité !!…

Marguerite avait enfin arrêté le battant énervant de son métier ; elle s’était levée, avait rangé quelques meubles dans la pièce, vaqué à de menus travaux dans la cuisine puis, s’excusant, s’était retirée dans sa chambre qui donnait sur la grand’salle. Léon Lambert avait mis son journal de côté et avait allumé une fine pipe de racine de bruyère.

« Et comment ça va par ici ? » demanda M. Larivé en se frottant les mains près du poêle dont les plaques de fonte étaient rouges.

— Ça va… répondit simplement Jean-Baptiste Morel.

— Pensez-vous que nous avons un hiver terrible ? répéta le fermier.

« Ah ! pour un hiver terrible, c’en est un, j’vous assure », répondit Jean-Baptiste, « terrible sous tous les rapports ; sans compter qu’les provisions sont chères, c’t’année, à n’y pas toucher du bout des doigts. »