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LE FRANÇAIS

à scie où on lui avait promis de scier ses planches dans la journée. Ce moulin à scie était situé dans le Rang Trois, au bord d’une petite rivière qui venait du côté de Guigues et qui, après avoir traversé quelques terres à l’ouest de Ville-Marie, se jetait en bouillonnant dans le lac. Il avait été construit exclusivement à l’usage des cultivateurs de la paroisse qui avaient besoin de planches et de madriers pour la construction et les réparations des dépendances de leurs fermes.

Il était bien rudimentaire le petit moulin à scie du Rang Trois de Ville-Marie ; aussi, se gardait-il d’avoir les proportions de ses grands frères des centres d’exploitation forestière du Saguenay ou de Saint-Maurice. C’était une sorte d’appentis en planches brutes, ouvert des quatre côtés à tous les vents du ciel et couvert d’un toit aux deux pentes légèrement inclinées. Au milieu de l’une d’elles surgissait un long tuyau de tôle noire par où s’échappait, à vingt pieds dans l’air, la fumée blanche de la fournaise. Au ras de la couverture de bardeau, à trois ou quatre pieds de distance du grand tuyau, un bout de tube de fonte laissait passer, pendant toute la journée, par petites bouffées blanches, saccadées et bruyantes, la vapeur de la bouilloire. Une soupente, attenant au corps principal de la bâtisse, abritait la fournaise, les armoires aux huiles et aux outils, et l’engin que l’on entendait « cogner » au loin. Dans la grande bâtisse se trouvaient les machines dont le nombre, pour l’usage auquel elles étaient destinées, était réduit au strict minimum. L’on voyait d’abord la grand’scie qui tournait au milieu du plancher et dont