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284 DE LA NOBLESSE

d’un nom, dit-on souvent, ne cause pas de prejudice materiel ; un débatde ce genre reveille des souvenirs d’un autre fige et n’est aujourd’hui qu’un anachronisme.^ N’ayons pas de ces preventions superflcielles, allons au fond deschoses. Sans dou’n te les prerogatives du vieux droit, les avantages niateriels attaches k certains noma at qui avaient 6te souvent le salaire du sang verse, le prix de services rendus, ont dfl complement disparaltre ; il ne faut ni les ressusciterni les regretter Mais le nom sans le fief, le nom sans les privileges eteints, le nom mfime sans la splendeur de la fortune ou reclat d’un long passe, a toujours quelque chose d’auguste et de sacre. Sous le nom, il y a toujours une notion cachSe et de serieux intéréts engages. Le nom est la chose la plus simple, elle est aussi la plus profonde. »

» Le nom est perpetuel, par ce qu’il est le signe vivant, la demonstration la plus 6nergique de la notion de propriete. Et quand la fortune mobilifcre s’acquiert si vite et se perd si vite encore ; quand la fortune territoriale se fractionne et disparalt chaque jour, il est utile que le nom reste avec son cachet de perpetuite comme le premier de nos patrimoines, justifiant en la resumant l’idee mfime de propriete. » Pourquoi nos lois ont-elles fait le nom heréditaire et transmissible seulement pour les miles, sinon parce qu’il rappelle et l’unite d’autorite du chef qui fonde les families et le respect du passe qui les perpetue : tradition sainte qui se retrouve partout, que Rome appelait le culte des dieux domestiques, et que nous avons nommée d’un nom plus simple et plus vrai, le culte des ancfttres. » Enfin pourquoi veut-on les noms inalienables et imprescriptibles, sinon parce qu’ils appartiennent autant k la nation qu’aux individus ? N’oublions pas en effet que les peuples grandissent dans la mesure du respect dont ils entourent leur histoid. Or, les masses n’apprennent Thistoire qu’avec des monuments ou avec des noms qui leur rappellent les reformes civiles, les grandes decouvertes, les glorieuses conqufites. Sur les champs de bataille de la vieille monarchie fran$aise, sur ceux du premier Empire, sur cette terre de Crimée encore couverte de notre sang fct de notre gloire, le peuple recueille des noms, et ces noms qu’il rend immortels parce qu’ils sont le symbole de grands faits, c’est pour lui l’histoire tout entifcre. » Voili Timportance et la puissance des noms au point de vue de la notion de propriete, de Tinterdt de famille et de la tradition nationale. » De 14 tirons deux consequences pratiques ; la premiere c’est que la chancellerie obeit aux traditions les plus saine§, lorsqu’elle se montre si severe pour changer, si prudente pour conserver ; la seconde c’est qu’il est puéril de revendiquer un nom qui n’est pas le sien et qu’il y a fierte legitime k defendre k toutes les époques un nom porte par ses ancfitres 1 . »

Ce sont bien la les consequences qui devraient résulter du retablissement de l’article 259 du Code penal, ainsi modifie :

o Sera puni d’une amende de 500 k 10,000 fr. quiconqua, sans droit et en vue de s’attribuer une distinction honoriflque, aura publiquement pris un titre, ou aura change, altere ou modifie le nom que lui assignent les actes de l’etat civil. » Nous trouvons rationnel qu’on ait etendu aux nom3, la pénalite qui ne devait

Gattfte des Tribunaux, du 6 ftvrier 1858.