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Le fait est que M. Bonenfant, depuis la mort de son ami, avait renoncé à tout espoir de recevoir la caisse de vin qu’on lui avait promise ; il regarda donc cet envoi comme une dispensation spéciale de la Providence en sa faveur. Il fut enchanté, naturellement, et dans l’exubérance de sa joie, il invita un grand nombre d’amis à souper avec lui le lendemain, afin de déguster le cadeau du bon M. Shuttleworthy. Non qu’il eût songé à prononcer le nom de son pauvre ami en formulant ses invitations. Il y pensa sans doute beaucoup ; mais il se décida à ne rien dire. Si j’ai bonne mémoire, il ne confia même à personne qu’on lui avait fait cadeau d’une caisse de château-margaux. Il se contenta de prier ses amis de venir l’aider à boire quelques bouteilles d’un excellent crû qu’il avait commandées et qu’il attendait le lendemain. Je n’ai jamais pu deviner pourquoi Charly jugea à propos de ne pas annoncer que ce vin était un cadeau de son ami défunt, mais il est probable qu’il avait d’excellentes raisons pour cela.

Le lendemain soir, une société nombreuse et choisie se trouvait donc réunie chez M. Bonenfant. Je puis même dire qu’une bonne moitié des habitants de Rattlebourg s’y trouvait. J’avais été invité un des premiers, bien entendu. La soirée se passa très-gaiement ; mais, au grand ennui de notre