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qui, selon l’antique usage, sort du fond du théâtre avec une contenance grave et sévère, s’avance à pas mesurés et fait le tour de la scène. Aucune femme de ce monde ne ressemble à celles de ce chœur ; jamais la maison d’un mortel ne montra une figure pareille ; leur taille est comme celle des géants.

Un manteau noir tombe sur leurs flancs, et dans leurs mains décharnées elles portent des flambeaux qui jettent une lueur sombre ; au lieu de cheveux, on voit se balancer sur leurs têtes des serpents et des couleuvres enflées par le venin.

Ce chœur épouvantable s’avance et entonne l’hymne fatal qui pénètre dans l’âme et enlace dans ses propres liens la pensée du coupable. Les paroles de ce chant lamentable retentissent et agitent ceux qui les écoutent, et nulle lyre ne les accompagne.

« Heureux, disent-elles, heureux celui qui n’a point senti le crime détruire la naïve innocence de son âme ! Celui-là, nous ne le poursuivrons pas ; il peut poursuivre librement sa route. Mais malheur, malheur à celui qui a volé ou commis un meurtre ! Nous nous attacherons à ses pas, nous filles terribles de la Nuit !

« Qu’il ne croie pas nous échapper ! Nous avons des ailes ; nous lui jetterons un lien au pied, et il tombera par terre. Aucun repentir ne nous fléchit ;