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L’IDÉAL.

Ainsi tu veux donc me quitter, infidèle, avec tes douces fantaisies, avec tes douleurs et tes joies ; tu veux fuir avec tous tes dons inexorables ! Rien ne peut-il t’arrêter, ô fugitif ? Ô temps doré de ma vie ! Non, je t’invoque en vain. Tu te précipites dans l’océan de l’éternité.

Ils sont éteints les beaux rayons qui éclairaient le sentier de ma jeunesse ; il s’est enfui l’Idéal qui jadis remplissait mon cœur enivré ! Elle a disparu l’heureuse croyance enfantée par mes rêves, cette croyance si belle, si divine ; elle est devenue la proie d’une grossière réalité.

De même qu’autrefois Pygmalion avec un ardent désir embrassait la pierre, jusqu’à ce que les joues glacées de sa statue de marbre éprouvassent une brûlante sensation, de même j’embrassais avec amour, avec l’ardeur de la jeunesse, la nature, jusqu’à ce qu’elle commençât à respirer, à s’échauffer sur mon cœur de poëte ;

Jusqu’à ce que, partageant mon ardeur, elle