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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

suite une seconde race bien inférieure à la première, celle de l’âge d’argent. Ce n’étaient plus les corps ni les esprits de l’âge d’or. Enfant durant cent années, l’homme croissait lentement par les soins, nécessaires à sa faiblesse, d’une mère attentive, à l’ombre du toit paternel. Puis, lorsqu’il arrivait enfin à la jeunesse, il vivait quelque temps encore, sujet à des maux produits par son peu de raison. Car les mortels ne pouvaient alors s’abstenir entre eux de l’injure funeste, ils ne voulaient point servir les dieux immortels, ni offrir de sacrifices sur leurs autels sacrés, comme le doivent les sociétés humaines. Aussi Jupiter les fit disparaître, irrité de ce qu’ils ne rendaient point d’honneurs aux bienheureux habitants de l’Olympe. Quand la terre eut encore enfermé dans son sein cette seconde race, habitants des demeures souterraines, ils reçurent aussi le nom de bienheureux, placés au second rang, mais non eux-mêmes sans honneurs.

Cependant Jupiter forma une troisième race, la race de l’âge d’airain, ne ressemblant en rien à celle de l’âge d’argent. C’étaient des hommes robustes et violents, issus de la dure écorce des frênes ; ils n’aimaient que l’injure et les œuvres lugubres de Mars ; ils ne se nourrissaient point des fruits de la terre ; leur cœur avait la dureté de l’acier ; mortels formidables, leur force était extrême : d’invincibles bras descendaient de leurs épaules sur leurs membres vigoureux. Ils avaient des armes d’airain, des maisons d’airain, ils ne se servaient que d’airain. Le fer, ce noir métal, était alors inconnu. Tombés sous l’effort de leurs bras, ils descendirent sans gloire dans la sombre et affreuse demeure de Pluton. Tout terribles qu’ils étaient, la