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la foule, et se livrant à quiconque aurait voulu l’arrêter pour lui faire rendre compte de sa conduite. Dans cette élection, il vit nommer consul, contre son avis, un homme audacieux, et son ennemi déclaré, qui le fut bien moins pour son mérite personnel que par la faveur de Pompée, que le peuple voulait obliger. Sylla, rencontrant Pompée qui s’en retournait tout glorieux de sa victoire, l’appela. « Jeune homme, lui dit-il, c’est de votre part un grand trait de politique que d’avoir fait nommer consul, avant Catulus, le plus sage de nos citoyens, un homme aussi emporté que Lépidus ; mais prenez garde de vous endormir, car vous avez donné des forces contre vous-même à l’adversaire le plus dangereux. Cette parole de Sylla eut l’air d’une prophétie : car Lépidus ne tarda pas à signaler son audace, et à prendre les armes contre Pompée.

XXXV. Sylla consacra à Hercule la dîme de ses biens, et, à cette occasion, il donna au peuple des festins magnifiques. Il y eut une telle abondance, ou plutôt une telle profusion de mets, que, chaque jour, on jetait dans le Tibre une quantité prodigieuse de viandes, et qu’on y servit du vin de quarante ans, et du plus vieux encore. Au milieu de ces réjouissances, qui durèrent