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cendants de cet Aristide qui avait tenu le premier rang dans la Grèce se virent réduits à une si grande pauvreté, que les uns furent obligés de se faire devins et interprètes des songes ; que d’autres vécurent d’aumônes publiques ; qu’aucun d’eux, enfin, ne put ni faire ni penser rien de grand et qui répondît à la réputation d’un ancêtre si illustre.

V. Mais ce point pourrait être sujet à contestation. En effet, la pauvreté n’est pas honteuse par elle-même ; on ne doit en rougir que lorsqu’elle est la suite de la paresse, de l’intempérance, de la prodigalité et de la folie : mais, se trouve-t-elle dans un homme sage, laborieux, juste, courageux, qui, dans l’administration publique, fasse paraître toutes les vertus ; alors elle est la marque d’un esprit élevé et d’un cœur magnanime. Il est impossible de faire de grandes choses, quand on n’a que des pensées ordinaires ; on ne peut non plus secourir les autres dans leurs besoins, quand on a soi-même des besoins multipliés. La plus grande provision pour bien gouverner n’est pas d’être riche, mais d’avoir l’aisance qui suffit, qui, en nous ôtant le désir du superflu, ne nous distrait jamais du soin des affaires publiques. Dieu seul n’a absolument besoin de rien : la vertu humaine, qui sait réduire le plus ses besoins, est