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CATON.

sait-il aux Romains dans ses remontrances, que vous êtes devenus grands, ne changez pas pour être pires ; si c’est à l’intempérance et au vice que vous devez votre grandeur, changez pour devenir meilleurs ; car vous vous êtes assez agrandis par ces voies perverses. » Il comparait ceux qui briguaient souvent les charges à des hommes qui, ne sachant pas leur chemin, voulaient, de peur de s’égarer, avoir toujours des licteurs devant eux pour les conduire. Il les blâmait de nommer souvent les mêmes magistrats. « Il faut, leur disait-il, ou que vous regardiez les fonctions de la magistrature comme bien peu importantes, ou que vous trouviez bien peu de gens capables de les remplir. » Voyant un de ses ennemis mener une vie infâme : « Sa mère, dit-il, doit croire faire une imprécation, et non une prière, en souhaitant de laisser son fils sur la terre après elle. » Il montrait un jour un homme qui avait vendu des biens paternels situés sur le bord de la mer ; et il disait, en feignant de l’admirer : « Cet homme est plus fort que la mer même : ce que la mer ne mine que lentement et avec peine, il l’a englouti en un instant. » Le roi Eumène étant venu à Rome le sénat lui rendit des honneurs extraordinaires ; et les premiers de la ville s’empressaient autour de lui, à l’envi