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lorsque Camille, bravant toute la haine qu’il ne pouvait manquer de s’attirer, parla contre la loi avec plus de liberté que personne, et fit, en quelque sorte, violence au peuple, qui, contre son propre sentiment, abrogea la loi. Mais ils furent si irrités contre lui, que le malheur domestique qu’il éprouva par le mort d’un de ses enfants, ne les toucha point et ne put apaiser leur colère. Camille, naturellement bon et sensible, fut si accablé de cette perte, que, cité en justice, il ne comparut pas, et se tint renfermé chez lui avec les femmes.

[12] Il eut pour accusateur Lucius Apuléius, qui lui imputa d’avoir détourné une portion du butin de la Toscane ; il en donnait pour preuves des portes d’airain qui en faisaient partie, et qui, disait-il, avaient été vues chez Camille. Le peuple, irrité, paraissait décidé à le condamner sur le moindre prétexte. Camille donc assembla ses amis, les officiers qui avaient fait la guerre avec lui, et tous ses anciens collègues ; ce qui formait une troupe considérable : il les conjura de ne point souffrir que, sur des accusations si calomnieuses, il subît une condamnation injuste qui le livrerait à la risée de ses ennemis. Après en avoir délibéré ensemble, ils lui répondirent qu’ils ne pouvaient rien pour empêcher le jugement ; mais que s’il était condamné à une amende, ils la payeraient pour lui. Camille