Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 3.djvu/129

Cette page n’a pas encore été corrigée

les ruines d’une ville détruite, tandis qu’il en avait une autre toute prête à habiter.

[32] XLI. Camille fut d’avis d’assembler de nouveau le sénat : il y parla lui-même longtemps pour l’intérêt de la patrie ; et tous les sénateurs qui voulurent parler furent aussi écoutés. Enfin, quand il fallut prendre les avis, il commença par Lucius Lucrétius, qui, en qualité de prince du sénat, le donnait toujours le premier, et il dit aux autres d’opiner après lui chacun à son rang. Il se fit un grand silence ; et Lucrétius prenait la parole, lorsque le centurion qui relevait la garde du jour, passant par hasard avec sa troupe devant le lieu du conseil, cria d’une voix forte à son premier enseigne de s’arrêter et de planter là son étendard ; que c’était la meilleure place qu’ils pussent choisir. Cette parole, si analogue à la circonstance, à la matière qui était en délibération, et à l’incertitude où étaient tous les esprits, n’eut pas été plutôt prononcée, que Lucrétius, après avoir adoré les dieux, dit qu’il conformait son opinion à l’oracle qu’il venait d’entendre. Tous les autres sénateurs suivirent son avis ; et aussitôt il se fit dans le peuple un changement si merveilleux, que, s’exhortant et s’animant les uns les autres à commencer l’ouvrage, sans attendre qu’on marquât les divisions des rues, ni qu’on donnât un ordre d’alignements,