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que Brutus fût instruit du bonheur qu'il avait eu, car ce combat naval s'était donné le même jour que la bataille de terre, et le hasard, plutôt que la mauvaise volonté des capitaines de vaisseau, fit que Brutus ne l'apprit que vingt jours après. S'il l'eût su plus tôt, il n'aurait pas livré un second combat : il avait pour longtemps toutes les provisions nécessaires à son armée ; et il était campé si avantageusement, qu'il n'avait pas à craindre les rigueurs de l'hiver, et qu'il ne pouvait être forcé par les ennemis. Il était enfin maître de la mer, il avait de son côté vaincu sur terre ; et ce double avantage devait lui donner la plus grande confiance et les plus hautes espérances. Mais l'empire romain ne pouvait être gouverné par plusieurs maîtres, il lui fallait un monarque ; et la divinité voulant sans doute délivrer César du seul homme qui pût mettre obstacle à sa domination, empêcha que Brutus ne fût informé de cette victoire au moment même où il allait l'apprendre. La veille du jour qu'il devait combattre, un déserteur, nommé Clodius, vint le soir dans son camp, pour l'avertir que les généraux ennemis ne se hâtaient de donner la bataille que parce qu'ils venaient d'apprendre la défaite de leur flotte. Mais on ne voulut pas le croire, il ne fut pas même présenté à Brutus ; et tous les officiers