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s'efforça de la retenir et de la rallier : il prit l'enseigne d'un des officiers qui fuyaient, et la planta à terre à ses pieds, sans pouvoir empêcher la fuite de ses propres gardes. Forcé donc de s'éloigner, il se retira, suivi de très peu de monde, sur une éminence d'où l'on découvrait toute la plaine. Mais il ne pouvait rien voir lui-même de ce qui se passait ; il avait la vue si faible, qu'il apercevait à peine le pillage de son camp. Ceux qu'il avait avec lui virent s'avancer un gros de cavalerie : c'était celle que Brutus lui envoyait ; et Cassius la prit pour celle des ennemis qui venait à sa poursuite. Il dépêcha cependant un de ses officiers, nommé Titinnius, pour s'en assurer. Les cavaliers de Brutus l'ayant reconnu pour un des plus fidèles amis de Cassius, jettent des cris de joie ; ses amis, mettant pied à terre, le reçoivent au milieu d'eux et le comblent de caresses : les autres l'entourent à cheval avec des cris de victoire, et font retentir toute la plaine du bruit de leurs armes.

Ces démonstrations de joie devinrent très funestes : Cassius ne douta pas que Titinnius ne fût enveloppé par les ennemis. « Trop d'attachement pour la vie, dit-il à ceux qui l'environnaient, m'a fait attendre de voir un homme que j'aime enlevé par les troupes ennemies. »