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à porter ses autres amis et ses capitaines, qui, couronnés de fleurs, passaient leur temps à boire. On n’aurait vu, dans tout ce cortège, ni bouclier, ni casque, ni lance ; le chemin était couvert de soldats qui, armés de flacons, de tasses et de coupes, puisaient sans cesse du vin dans des cratères et dans des urnes, et se portaient les santés les uns aux autres, soit en continuant leur route, soit assis à des tables qu’on avait dressées le long du chemin. Tout retentissait au loin du son des flûtes et des chalumeaux, du bruit des clairons et des danses de femmes qui ressemblaient à des bacchantes. Une marche si déréglée et si dissolue était accompagnée de jeux où éclatait toute la licence des bacchanales ; on eût dit que Bacchus présidait en personne à cette orgie. Quand il fut arrivé au palais des rois de Gédrosie, il fit encore reposer son armée, en continuant toujours les mêmes jeux et les mêmes festins. Un jour qu’il était, dit-on, plein de vin, il assista à des chœurs de danse, où Bagoas, qu’il aimait et qui avait fait les frais des jeux, remporta le prix. Le vainqueur, après avoir reçu la couronne, traversa le théâtre, paré comme pour la fête, et alla s’asseoir auprès d’Alexandre. Les Macédoniens battirent des mains et invitèrent le roi, par leurs cris, à lui donner un baiser ;