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VIE

l’auteur de tous les biens. Il a parlé de la divinité en des termes si magnifiques et si sublimes, qu’on est tenté de croire qu’il connaissait nos livres saints, et que c’est à cette source pure qu’il a puisé ces grandes idées qu’on ne trouve dans aucun autre philosophe de l’antiquité, sans en excepter Platon lui-même, quelquefois si étonnant par les traits de lumière qu’il laisse échapper sur ce sujet. Voilà la vraie cause de ce dépit secret qui arme nos sophistes modernes contre un philosophe estimable à qui ils ne pardonnent pas ses sentimens religieux. Un nouveau grief contre lui, c’est qu’après avoir vivement combattu la superstition, il a encore moins ménagé l’athéisme. De son temps, la Grèce était inondée d’un déluge de sophistes qui, sous le nom fastueux de philosophes, étaient les ennemis de la véritable sagesse, et faisaient gloire de leur impiété ; ils s’efforçaient d’anéantir toute idée de la divinité, pour détruire avec elle toute morale et toute justice. Plutarque osa les attaquer avec courage, et opposer à ce torrent dévastateur la fermeté et la sagesse de ses principes ; il compara les athées avec les superstitieux, et fit voir que l’athéisme n’est pas un moindre mal que la superstition ; qu’il est même plus dangereux dans ses suites, plus funeste par son