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SOLON.


sion ; et il lui en coûta un œil, pour faire passer la plus importante des institutions, la plus propre à rendre sa ville heureuse, à γ maintenir la concorde en ne laissant parmi les citoyens ni riche ni pauvre. Solon, au contraire, né d’une famille plébéienne et dans une condition médiocre(16), ne pouvait aspirer à une pareille entreprise, mais au moins ne resta-t-il pas au-dessous des moyens qu’il avait en sa puissance, n’étant soutenu que par sa sagesse et par la confiance qu’on avait en lui. Au reste, il témoigne lui-même que cette loi avait offensé la plupart des Athéniens, qui s’étaient attendus à autre chose.

Ceux qui, le cœur rempli d’une douce espérance,
De me plaire d’abord se montraient si jaloux,
Ne roulent aujourd’hui que projets de vengeance,
Et fixent tous sur moi des yeux pleins de courroux.


Mais, ajoute-t-il, tout autre, avec la même autorité,

N’eût pu d’un peuple altier réprimer la licence,
Qu’il ne l’eût épuisé, réduit à l’indigence.


Toutefois les Athéniens ne tardèrent pas à reconnaître l’utilité de cette loi ; ils cessèrent de murmurer, firent en commun un sacrifice qu’ils appelèrent le sacrifice de la décharge, confirmèrent à Solon le litre de législateur, et le chargèrent de réformer le gouvernement. Ils lui conférèrent pour cela un pouvoir si illimité, qu’il