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une nature mortelle les privilèges de la divinité.

XL. À la vérité, ce serait une basse jalousie, et même une impiété, que de refuser à la vertu toute participation de la nature divine ; mais vouloir confondre la terre avec le ciel, ce serait une folie. Tenons-nous-en donc à ce qu’il y a de plus certain, et disons avec Pindare :

Le corps fragile et périssable Doit subir de la mort l’arrêt inévitable ; L’âme, qui ne périt jamais, Jouit au sein de Dieu d’une éternelle paix.

Elle seule vient des dieux et retourne au ciel, d’où elle tire son origine, non pas avec le corps, mais après qu’elle en a été entièrement séparée ; que, devenue pure et chaste par cette séparation, elle ne tient plus rien d’une chair mortelle. L’âme sèche, dit Héraclite, est la plus parfaite ; elle s’élance du corps comme l’éclair de la nue. Mais celle qui, confondue, et, pour ainsi dire, amalgamée avec le corps, s’est rendue toute charnelle, semblable à une vapeur épaisse et ténébreuse, s’enflamme difficilement et s’élève avec peine. Gardons-nous donc d’envoyer au ciel, contre leur nature, les corps des hommes vertueux ; mais soyons fortement persuadés qu’après leur mort, et par leur nature même et par la volonté des dieux, ils