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grand nombre de fuyards eurent honte d’abandonner ainsi leur roi ; et, par un changement subit, le courage 122 prenant en eux la place de la frayeur, ils s’arrêtèrent à l’endroit où est maintenant le temple de Jupiter Stator, c’est-à-dire qui arrête (21). Là ils se rallient, et repoussent les Sabins jusqu’au lieu où sont maintenant le palais appelé Regia et le temple de Vesta.

XXIV. Comme ils se préparaient de part et d’autre à recommencer le combat, ils sont arrêtés par le spectacle le plus étonnant et le plus difficile à représenter. Les Sabines qui avaient été enlevées, accourant de tous côtés avec de grands cris, et comme poussées par une fureur divine, se précipitent au travers des armes et des monceaux de morts, se présentent à leurs maris et à leurs pères, les unes avec leurs enfants dans les bras, les autres les cheveux épars ; et toutes ensemble, adressant la parole tantôt aux Sabins, tantôt aux Romains, leur donnent les noms les plus tendres. Les deux partis, également, touchés de ce spectacle, les reçoivent au milieu d’eux. Alors leurs cris percèrent jusqu’aux derniers rangs, et leur état remplit tous les cœurs d’un sentiment de pitié qui devint encore plus vif lorsque, après des remontrances aussi libres que justes, elles finirent par les prières les