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blables, et qui le fit surnommer Rhyparographe. Ses tableaux font un plaisir infini, et ils se sont vendus plus cher que de très grands morceaux de beaucoup d’autres.

2 Au contraire, un seul Sérapion, exposé sous les Vieilles Boutiques, couvrait, dit Varron, tous les Mæniens113. Ce peintre réussissait très-bien pour les décorations, mais ne pouvait peindre une figure d’homme, tandis que Dionysius n’a peint que des hommes, aussi fut-il surnommé Anthropographe. Calliclès a fait aussi de petits ouvrages. Calatès114 traita en petit des sujets comiques. Antiphile travailla dans l’un et l’autre genre ; car il a fait une très-belle Hésione, Alexandre et Philippe avec Minerve, ouvrages qui sont dans l’école des portiques d’Octavie ; et dans le portique de Philippe il y a de lui un Bacchus, un Alexandre enfant, Hippolyte effrayé à la rue du taureau lancé contre lui ; dans le portique de Pompée, Cadmus et Europe. 3 D’un autre côté, il a peint une figure habillée ridiculement115, à laquelle il donna le nom plaisant de Gryllus, ce qui fit appeler grylles ces sortes de peintures. Antiphile était né en Égypte, et avait eu pour maître Ctésidéme. 4 Il convient de ne point passer sous silence le peintre du temple d’Ardée (XXXV, 6), honoré du droit de bourgeoisie dans cette ville, et de cette inscription en vers qui et sur la peinture même : « Ces peintures, digne ornement de ces augustes lieux, du temple de Junon, reine et épouse116 du dieu suprême, sont l’œuvre de Plautius Marcus Cleœtas, originaire d’Alalie117, que la ville d’Ardée célèbre aujourd’hui et célèbrera toujours, à cause de ses talents. » 5 Ces vers sont écrits en anciens caractères latins. Il ne faut pas non plus faire tort à Ludius, du temps du dieu Auguste : celui-ci, le premier, imagina de décorer les murailles de peintures charmantes, y représentant des maisons de campagne, des portiques, des arbrisseaux taillés, des bois, des bosquets, des collines, des étangs, des euripes, des rivières, des rivages, au souhait de chacun ; des personnages qui se promènent ou qui vont en bateau, ou qui arrivent à la maison rustique, soit sur des ânes, soit en voiture ; d’autres pêchent, tendent des filets aux oiseaux, chassent, ou même font la vendange. On voit dans ces peintures de belles maisons de campagne, dont l’accès est marécageux ; des gens qui portent des femmes sur leurs épaules, et qui ne marchent qu’en glissant et en tremblant ; et mille autres sujets de ce genre plaisants et ingénieux. Le même artiste a le premier décoré les édifices non couverts (hypæthres, promenoirs) de peintures représentant des villes maritimes qui font un effet, très agréable et à très peu de frais. 6 Mais il n’y a de gloire que pour les artistes qui ont peint des tableaux, et c’est ce qui rend encore plus respectable la prudence118 de l’antiquité. En effet, alors les murs et les maisons ne s’ornaient pas pour les seuls possesseurs, de peintures qui fixées en un lieu ne pouvaient être sauvées d’un incendie. Protogène se contentait d’une cabane dans son jardin ; il n’y avait point de peintures sur les crépis d’Apelle ; on ne s’était pas avisé de peindre des murailles entières. Chez tous119 ces artistes l’art ne veillait que pour les villes, et un peintre appartenait à toute la terre. Un peu avant le dieu Auguste, Arellius fut célèbre à Rome ; mais il profana son art par un sacrilège insigne : toujours amoureux de quelque femme, il donnait aux déesses qu’il peignait les traits de ses maîtresses : aussi en faisait-on le compte dans ses tableaux. 7 Fabullus vivait dernièrement ; c’était