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athénien, et l’emblème est ingénieux : 9 il lui fallait, en effet, le montrer léger, colère, injuste, inconstant ; d’un autre côté, facile à toucher, doux, compatissant, plein de grandeur, glorieux, humble, hardi, timide, et tout cela en même temps. Il peignit le Thésée qui est à Rome au Capitole, un capitaine de vaisseau cuirassé, et, dans un tableau qui est à Rhodes, Méléagre, Hercule, Persée. Ce tableau, frappé trois fois de la foudre, n’a pas été effacé ; cela augmente l’admiration qu’il excite. 10 Il a peint un Archigalle, tableau que Tibère aima beaucoup. Ce prince, d’après Décius Eculéon, le paya 60,000 sesterces (12,600 fr) et le plaça dan sa chambre à coucher. Il a peint une nourrice crétoise qui tient un enfant dans ses bras, Philiscus, Bacchus, avec la Vertu debout, à côté ; deux enfants, dans lesquels on voit la sécurité et la simplicité de leur âge ; un prêtre, qui a près de lui un enfant avec un encensoir et une couronne. Il y a encore de lui deux tableaux très-célèbres : l’un représente un coureur armé, disputant le prix de la course ; on croit le voir suer : l’autre, un coureur armé déposant ses armes ; on croit le voir haleter. On vante son Énée, Castor et Pollux, représentés dans un même tableau ; Téléphe, Achille, Agamemnon, Ulysse. 11 Artiste fécond, mais qui a usé avec plus d’insolence et d’orgueil que nul autre de la gloire de ses talents. Il se donna des surnoms, rappelant Abrodiète (vivant dans le luxe), et, dans d’autres vers69, se déclarant prince de la peinture, conduite par lui, disait-il, à la perfection. Surtout il se prétendait un rejeton d’Apollon, et se vantait d’avoir peint l’Hercule qui est à Linde tel qu’il lui était souvent apparu dans le sommeil. À Samos, mis, par une grande majorité de suffrages, après Timanthe pour un tableau d’Ajax et du jugement des armes, il dit qu’il souffrait, au nom du héros, de le voir vaincu une seconde fois par un indigne adversaire. Il peignit aussi de petits tableaux obscènes, se délassant par ce badinage impudique.

12 Quant à Timanthe, il eut surtout de l’esprit. Son Iphigénie a été célébrée par les éloges des orateurs (Cic., de Orat. 22, § 74) : l’ayant représentée debout, près de l’autel où elle va périr, il peignit la tristesse sur le visage de tous les assistants, et surtout de l’oncle ; et, ayant épuisé tous les caractères de la douleur, il voila le visage du père, ne trouvant plus possible de lui donner l’expression convenable. On a encore d’autres preuves de son esprit, par exemple, son petit tableau du Cyclope dormant : pour faire sentir la taille du géant, il a peint des Satyres qui en mesurent le pouce avec un thyrse. Cette le seul70 dont les ouvrages donnent à entendre plus qu’il n’a peint ; et quoique le plus grand art s’y manifeste, on sent cependant qu’il y a encore plus d’esprit. Il a peint un héros, qui est un ouvrage très-parfait, et a porté au plus haut point l’art de peindre les figures héroïques : cet ouvrage est actuellement à Rome, dans le temple de la Paix.

13 Du même temps, Euxénidas eut pour élève Aristide, illustre artiste ; et Eupompe eut pour élève Pamphile, maître d’Apelle. Il y a d’Eupompe un vainqueur dans un combat gymnique, tenant une palme. Sa réputation fut si grande qu’il fit école, et que, au lieu de deux genres admis précédemment, le grec et le genre dit asiatique, une subdivision faite dans le genre