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phants (XXXIII, 38), la peinture ne fait plus de chefs-d’œuvre. Donc tout a été meilleur quand les ressources étaient moindres. Oui, il en est ainsi ; et cela parce que, comme nous l’avons dit plus haut (XXXV, 2, 2), on s’attache à la valeur de la matière, et non à celle du génie.

XXXIII

1 Je n’omettrai pas une folie de notre siècle en fait de peinture : l’empereur Néron s’était fait peindre d’une proportion colossale, de cent vingt pieds, sur de la toile ; chose inconnue jusqu’alors. Ce tableau était à peine achevé, que la foudre tomba dessus et le consuma, avec la plus grande partie des jardins de Maius, où il était. Un des affranchis de ce prince, donnant à Antium le spectacle des gladiateurs, garnit47, comme on sait, les portiques publics de peintures où étaient les portraits réels des gladiateurs et de tous les employés. À Antium, depuis des siècles, on a un goût décidé pour la peinture. Ce fut C. Térentius Lucanus qui le premier fit peindre, pour les exposer en public, des combats de gladiateurs : en l’honneur de son aïeul, qui l’avait adopté, il donna pendant trois jours trente paires de gladiateurs dans le Forum, et exposa le tableau de ce combat dans le bois de Diane.

XXXIV

(VII.)
1
Maintenant j’énumérerai aussi brièvement qu’il me sera possible les peintres célèbres ; car il n’entre pas dans le plan de notre ouvrage de donner là-dessus des développements. C’est pourquoi il suffira pour beaucoup de les nommer pour ainsi dire, en passant48, et à l’occasion de certains autres : pour les ouvrages renommés soit existants, soit perdus, il faudra toujours en parler, au moins sommairement. L’exactitude des Grecs est ici en défaut : ils n’ont placé les peintres que plusieurs olympiades après les statuaires et les toreutes. Le premier peintre qu’ils nomment est de la quatre vingt-dixième olympiade ; cependant on rapporte que Phidias lui-même avait d’abord été peintre, et qu’il peignit à Athènes l’Olympium49 ; et l’on convient en outre que, dans la quatre-vingt-troisième olympiade, son frère Panænus peignit à Élis (XXXVI, 55) l’intérieur du bouclier de la Minerve faite par Colotès, élève de Phidias, et son aide pour l’exécution du Jupiter Olympien (XXXIV, 19, 6). 2 Ajoutons encore ceci : il est également avéré que Candaule, le dernier roi lydien de la race des Héraclides, lequel est dit aussi Myrsile, paya au poids de l’or un tableau du peintre Bularque (VII, 39), qui représentait la bataille des Magnésiens, tant la peinture était déjà estimée. Ce fait doit coïncider avec l’époque de Romulus : en effet, Candaule mourut dans la dix huitième olympiade, ou, comme quelques-uns le prétendent, l’année même de la mort de Romulus ; ce qui démontre, si je ne me trompe, que dès lors l’art était renommé et parfait. 3 S’il faut admettre cette conclusion, il en résulte que les commencements de la peinture remontent beaucoup plus haut, et que ceux (dont on ne fixe pas l’époque) qui ont peint des monochromes doivent être reportés à une date plus reculée : Hygiænon51, Dinias, Charondas, et celui qui le premier distingua52 les sexes dans la peinture, Eumare d’Athènes, qui se hasarda à imiter toutes sortes de figures ; enfin Cimon de Cléonée, qui développa les inventions d’Eumare. 4 Cimon inventa les catagraphes, c’est-à-dire les têtes de profil ; et il imagina de varier les visages de ses figures, les faisant regarder ou en arrière, ou en