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lieu consacré ou dans un lieu public, fut, à ce que je trouve, Appius Claudius, qui fut consul avec P.  Servilius l’an de Rome 259 : il plaça ses aïeux dans le temple de Bellone ; il voulut qu’ils fussent en un lieu élevé, pour être vus, et que les titres de leurs dignités fussent inscrits. Beau spectacle, surtout quand la foule des enfants14, représentée par de petites images, montre les rejetons destinés à continuer la lignée ; personne alors ne regarde ces écussons sans plaisir et sans intérêt.

IV

1 Après Claudius, M. Æmilius (VII, 54, 2), collègue dans son consulat de Q. Lutatius, plaça de semblables images, non seulement dans la basilique Æmilienne, mais aussi dans sa maison : usage vraiment martial. En effet, les images étaient sur des boucliers semblables à ceux qu’on portait à Troie15 ; c’est de là aussi qu’elles ont pris le nom de clypeus (écu, écusson), et non, comme le veut la subtilité fourvoyée des grammairiens, de cluere (être célèbre) : inspiration toute militaire du courage, que de représenter sur un bouclier l’image de celui qui s’en servait. 2 Les Carthaginois ont fait en or et les boucliers et les portraits, et ils les portaient16 avec eux dans les camps : le fait est que Marcius, vengeur des Scipions en Espagne, trouva, après avoir forcé le camp d’Asdrubal, un bouclier semblable qui appartenait à ce général. Ce bouclier resta suspendu au-dessus de la porte du Capitole jusqu’au premier incendie de ce temple (XXXIII, 5). Au reste, on a remarqué que nos ancêtres avaient à cet égard si peu de souci, que sous le consulat de L. Manlius et de Q. Fulvius, l’an de Rome 575, M. Aufidius, à qui la garde du Capitole avait été affermée, avertit le sénat que des boucliers passés en compte pour boucliers de cuivres, depuis quelques lustres, étaient d’argent.

V

1 La question des commencements de la peinture est obscure, et n’appartient pas au plan de cet ouvrage. Les Égyptiens assurent que cet art fut inventé chez eux six mille ans avant de passer en Grèce : c’est évidemment une vaine prétention. Parmi les Grecs, les uns disent qu’il fut découvert à Sicyone, les autres à Corinthe, tous convenant que les commencements en furent de circonscrire par une ligne l’ombre d’un homme. Voilà quel en a été le premier état. Dans le second, on employa une seule couleur, procédé dit monochrome, après que des procédés plus compliqués eurent été découverts ; encore aujourd’hul la peinture monochrome est en usage. 2 L’invention du dessin au trait est attribuée à Philoclès d’Égypte, ou à Cléanthe de Corinthe. Les premiers qui le pratiquèrent furent Ardicès17 de Corinthe et Teléphane de Sicyone : ces artistes, sans se servir encore18 d’aucune couleur, jetaient dès lors des traits dans l’intérieur du contour ; aussi était-on dans l’usage d’ajouter le nom du personnage figuré. Le premier qui inventa l’art de colorier les dessins, et c’est avec des tessons broyés de pots d’argile, fut Cléophante de Corinthe. Nous dirons bientôt (XXXV, 43), que ce Cléophante est différent19 de l’artiste du même nom qui, selon Cornélius Népos, suivit en Italie Démarate, père du roi romain Tarquin l’Ancien. Démarate fuyait Corinthe, pour échapper aux violences du tyran Cypsèle.

VI

1 Déjà, en effet, la peinture était parfaite, même en Italie : il est certain du moins qu’il existe encore aujourd’hui à Ardée, dans des temples, des peintures plus vieilles que Rome. Rien ne paraît plus merveilleux que ces peintures, qui, sans être protégées par un toit, ont,