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L’ÉTRANGER

Si donc les nourrissons de Saturne, dans un si grand loisir, avec la faculté de communiquer par le langage, non seulement entre eux, mais avec les animaux, usaient de tous ces avantages pour l’étude de la philosophie, vivant dans le commerce des animaux et de leurs semblables, s’informant auprès de tous les êtres si quelqu’un d’entre eux n’aurait pas, par quelque faculté particulière, fait quelque découverte qui pût contribuer à l’avancement de la science, il est facile de juger que les hommes d’alors jouissaient d’une félicité mille fois plus grande que la nôtre. Que si, au contraire, ils attendaient d’être gorgés de nourriture et de boisson pour converser entre eux et avec les animaux, selon les fables qu’on en raconte encore à l’heure qu’il est, la question est encore, à mon avis, très simple à résoudre. – Mais laissons cela, jusqu’à ce qu’un messager se présente à nous, qui soit en état de nous apprendre de laquelle de ces deux manières les hommes de ce temps-là manifestaient leur goût pour la science et la discussion. Pour quelle raison nous avons remis cette fable au jour, voilà ce qu’il nous faut dire, afin d’aller ensuite en avant. Lorsque l’époque qui comprend toutes ces choses fut accomplie, qu’une révolution dut avoir lieu, que la race issue de la terre eut péri tout entière, que chaque âme eut passé par toutes ses générations, et livré à la terre les semences qu’elle lui devait, il arriva que le maître de cet univers tel qu’un pilote qui abandonne le gouvernail, se retira à l’écart, comme en un lieu