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THÉAGÈS

Alors Socrate de répliquer : « Aussi, pourquoi ne m’as-tu pas écouté quand je te rappelais ? Je venais de recevoir mon présage divin habituel ». Cicéron rapporte encore comment, après la défaite de Délium, alors que Lachès et ses troupes fuyaient, Socrate, qui suivait l’armée, arrivé à un carrefour, s’engagea dans une route différente de celle que prenaient les autres. On lui en demanda la cause : « C’est, dit-il, que le dieu m’en détourne ». Or, ceux qui prirent un autre chemin tombèrent au milieu de la cavalerie ennemie[1]. La même histoire est consignée par Plutarque[2] et développée dans la 1re  Lettre socratique[3].

Cette lettre est un document assez curieux qui doit dater de l’époque post-aristotélicienne. Socrate est censé répondre à un chef d’État et refuse de quitter Athènes pour se rendre à l’invitation de son correspondant. Ce dernier met sa fortune à la disposition de celui qu’il voudrait pour maître. Mais Socrate méprise l’argent, et la cupidité ne parviendra pas à l’arracher à sa vie habituelle. De plus, il doit remplir une mission à Athènes : « Le dieu m’a imposé ce devoir et il n’est pas étonnant que cela m’attire des haines ; mais il ne permet pas que je me désiste. Or, il est préférable de lui obéir. Évidemment, il sait mieux que moi ce qui convient. Quand je voulais venir chez toi, il m’en a empêché et, comme une seconde fois tu me mandais auprès de toi, il m’a interdit de partir. Je n’ose lui résister… Ce qu’on fait suivant l’avis des dieux produit un heureux résultat ; en agissant, au contraire, en opposition avec eux, on ne retire aucun profit… Je ne serais pas surpris que tu n’ajoutasses pas foi à mes paroles concernant mon signe divin. Bien d’autres aussi se trouvaient dans tes dispositions d’esprit. Beaucoup ont refusé de me croire à la bataille de Délium… » Ici, l’épistolier relate le fait que nous avons mentionné plus haut, puis il ajoute : « À quelques-uns, j’ai prédit en particulier bien des événements qui devaient se réaliser, grâce à la connaissance que m’en communiquait le dieu[4] ». On glanerait encore d’autres

  1. De diuinaitone, I, 54.
  2. De Genio Socratis, ii.
  3. Hercher, Epistolographi graeci, p. 609.
  4. Hercher, p. 611 : πολλὰ δὲ καὶ ἰδίᾳ προηγόρευσα ἐνίοις τῶν ἀποβησομένων διδάσκοντος διδάσκοντος τοῦ θεοῦ.