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NOTICES

bios et Théodote, ces deux derniers surtout auditeurs et témoins, entretien qui décida de la rupture entre le tyran et le philosophe (VII, 349 a et suiv.). Le pastiche eût été trop apparent. Mais il s’est inspiré du récit. Pour satisfaire à la vérité historique, il a commencé par le résumer très brièvement, sous une simple forme narrative (318 c, d). Puis, il a imaginé à son tour une scène du jardin. Même décor, même nombre de personnages, mais Eurybios et Théodote sont ici remplacés par Archédèmes et Aristocritos. Un fait rappelle un événement qui, d’après la 7e lettre, fut la conséquence de la querelle du palais. D’après cette lettre, après la brouille, Platon a dû quitter l’acropole. Mais ses allées et venues sont continuellement épiées. Une visite à Théodote lui vaut une sèche réprimande du prince susceptible : « tu agis très mal, lui mande-t-il par un de ses messagers, en faisant plus de cas de Dion et de ses amis que de moi-même » (VII, 349 e). Dans la 3e lettre, c’est Denys qui adresse directement le reproche au philosophe et engage ainsi la discussion (319 a). Il fallait encore mentionner ici, pour être complet, la colère du tyran, et l’auteur n’y manque pas (III, 319 b et VII, 349 a). Seule, ou à peu près, la matière de la dispute varie, tandis que le cadre, la psychologie des personnages, le développement même du petit drame et son dénouement sont presque identiques.

Si l’on voulait poursuivre le parallèle entre les deux lettres, on pourrait signaler les transferts d’expressions d’un épisode à un autre, les raccourcis de la 3e épître, d’une exactitude parfois très approximative (cf. v. g. 318 a et VII, 347 d). Ce que nous avons dit suffit néanmoins pour inspirer les doutes les plus légitimes sur l’authenticité.

Il n’est pas surprenant que le style se rapproche beaucoup plus que dans les autres lettres de la manière platonicienne, puisque, en grande partie, termes et tournures proviennent d’une source authentiquement platonicienne. Toutefois, la plume de l’écrivain n’est pas tellement sûre qu’elle sache éviter toute locution accusant l’anachronisme. Un Athénien du ive siècle aurait-il employé l’aoriste et ἂν au sens itératif, avec une conjonction comme ὅτε dans la phrase ὅτε τι πλέον ποιεῖν ἂν ᾠήθην… ? L’expression paraît avoir une saveur d’hellénisme[1].

  1. Voir Debrunner, Glotta XI, p. 1 et suiv.