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LETTRE VII

quisquis attente legerit, omnia tam confuse tamque obscure dicta esse fatebitur, ut revera ænigmate loqui scriptor videatur[1]. » Plus loin, il commente ainsi un des fragments essentiels du texte : « Videnturne haec esse sani capitis cogitata, an potius delirantis vel præstigiatoris nugæ ? [2] » La sentence de Karsten a paru définitive à des critiques tels que Richards, qui se déclare incapable d’attribuer à Platon un écrit aussi ridicule et voit dans ces quelques pages une objection insurmontable contre l’authenticité de la 7e lettre[3]. De son côté, C. Ritter retranche les pages 341 a-345 c et les regarde comme l’interpolation d’un disciple maladroit[4]. Ces conclusions sévères ont été revisées. Je ne citerai que les travaux d’Adam, de Raeder ou de Taylor. Il ne peut être question de reprendre ici toutes les phases du procès et de suivre point par point les allégations de Karsten. La méthode préférable en pareille matière me paraît consister à commenter le passage, en essayant de mettre en relief les principales articulations et l’enchaînement des pensées. Nous verrons mieux ainsi quel est le sens de ces idées, si elles s’accordent ou non avec les doctrines et la manière authentiquement platoniciennes.

Rappelé avec insistance par Denys, poussé par Dion alors exilé à Athènes, Platon a fini par faire taire ses répugnances et par céder aux invitations du tyran. On prétendait que Denys s’était épris de la philosophie. Ne convenait-il pas de vérifier cette affirmation ? car rien ne saurait être négligé, quand il s’agit de préparer un chef vraiment digne du pouvoir. Or, il existe une méthode très sûre pour éprouver la vocation des candidats à la philosophie : il faut leur montrer ce qu’est la science vers laquelle ils aspirent, son importance, ses difficultés, le labeur qu’elle réclame. Ils ne doivent pas s’imaginer qu’on l’acquiert au prix de quelques conversations, mais se persuader qu’on ne parvient à la posséder qu’après une vie d’efforts, efforts de l’esprit, efforts de l’âme. Aussi quand un maître avisé a eu soin de convaincre ses disciples de cette vérité, quand il les a dirigés dans cette voie austère, il peut être certain que seuls les véritables amants de la

  1. Op. cit., p. 193.
  2. Op. cit., p. 194.
  3. Platonica, p. 277.
  4. Voir surtout Platos Gesetze, p. 374 et suiv.