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NOTICE GÉNÉRALE

indignes du nom dont elles se paraient et son jugement fut alors regardé comme décisif. On ne voulait pourtant pas dénier toute valeur à cette correspondance. On reconnaissait pratiquement son autorité en continuant à l’utiliser, à titre de source ancienne, pour raconter la vie de Platon. Mais on assignait comme auteur à certaines de ces lettres, surtout à la 7e, tenue toujours pour la plus importante, quelque disciple ou ami de Platon, tel Speusippe. Dès ce moment, à l’instigation de Socher[1], on se mit à établir des groupes, où la lettre 7e occupait le premier rang, suivie immédiatement de la 3e et de la 8e.

Grote, à peu près seul, osa vers cette époque réagir contre ces destructions excessives. On aurait trop craint de se compromettre, suivant la jolie remarque d’Apelt, en risquant de se prononcer en faveur de l’authenticité, et on préférait suspendre son jugement que de passer pour retardataire[2]. L’historien de la Grèce estima les arguments d’Ast moins impressionnants que les témoignages de Cicéron ou de Plutarque, et il pensa qu’il était de mauvaise critique de vouloir assimiler le genre des Lettres à celui des Dialogues et d’apprécier suivant une norme trop étroite la valeur littéraire d’œuvres aussi différentes. Il faut bien avouer que les raisons alléguées pour justifier la condamnation étaient surtout des raisons de goût, de psychologie, raisons très fines, j’en conviens, et d’un grand poids, mais qui n’emportent pas à elles seules la conviction, des affirmations toutes contraires pouvant leur être opposées en vertu d’indices analogues. Le problème avait besoin d’être examiné plus à fond et sur des bases plus larges.

En 1854, Karsten écrivit sa Commentatio critica de Platonis quae feruntur Epistolis, praecipue tertia, septima et octava (Utrecht 1864). Après avoir étudié en détail la composition, le style de la correspondance, les faits historiques et les doctrines, l’auteur concluait : les treize lettres soi-disant platoniciennes, malgré leurs différences, trahissent une origine

  1. Socher, Über Platons Schriften, München, 1820, p. 376-431.
  2. Apelt, Platons Briefe, Leipzig, 1921, p. 12.