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LETTRE III

trirème avec des lettres de toi. Dans ces lettres, tu me disais d’abord que si j’arrivais, les affaires de Dion s’arrangeraient toutes selon mes désirs ; sinon, ce serait le contraire. En vérité, je n’oserais rappeler combien de lettres tu envoyas, toi, et d’autres sur tes sollicitations, d’Italie et de Sicile, à tant de parents et c d’amis ! Toutes me pressaient de partir et me suppliaient de t’obéir. Donc, tous, à commencer par Dion, étaient d’avis que je m’embarque sans tergiverser[1]. En vain je prétextais mon âge[2], j’insistais sur le fait que tu étais incapable de résister à ceux qui me calomniaient et rêvaient de nous voir ennemis, car je comprenais alors et je comprends maintenant que plus sont grandes et démesurées les richesses des particuliers d et même des rois, plus elles nourrissent de calomniateurs, de compagnons pour les plaisirs dégradants et infamants, le plus grand fléau, sans contredit, qu’engendre la fortune ou toute autre forme de puissance. Et pourtant, je laissai tomber toutes ces raisons et je vins. Je ne voulais pas qu’aucun de mes amis pût m’accuser d’avoir par lâcheté laissé ruiner toute sa fortune, alors que je pouvais la e sauver. Je vins donc et tu sais bien tout ce qui s’est alors passé. Je te demandais d’abord, suivant les promesses que contenaient tes lettres, de rappeler Dion en lui rendant ton intimité, je parle de cette intimité, grâce à laquelle, si tu m’avais cru alors, les événements auraient probablement tourné bien plus heureusement qu’ils ne l’ont fait, pour toi, pour les Syracusains et pour tous les Grecs : ainsi du moins le conjecture mon opinion. Je te demandais ensuite de confier les biens de Dion à sa famille 318 et de ne pas les laisser administrer par les administrateurs[3] que tu

    le jeune, moins belliqueux que son père, liquida rapidement la guerre contre l’ennemi traditionnel, les Carthaginois. Il prolongea davantage les hostilités contre la Lucanie, mais il combattait sans enthousiasme, et, malgré des succès, il se hâta de mettre un terme aux luttes étrangères et d’accepter les conditions de paix.

  1. Ce passage résume les longs développements de la Lettre VII, 339 a-340 b.
  2. Platon avait à ce moment-là près de 70 ans.
  3. D’après la Lettre VII (345 c, d), Denys gênait, au contraire, les administrateurs des biens de Dion qui voulaient envoyer à l’exilé ses revenus. Il s’efforçait de se substituer à eux en qualité de tuteur du fils de Dion. Les renseignements fournis dans la Lettre III ne s’accordent donc pas pleinement avec ceux que donne la Lettre VII.