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NOTICE

tyle fait plusieurs fois allusion à l’état précaire de sa fortune[1]. Il ressort de notre dialogue[2] qu’il connaît les théories de Protagoras. D’autre part il est lié avec Cratyle, qu’il a souvent l’occasion d’entretenir et qu’il accompagne, à la fin, dans son départ pour la campagne.

Tel que le dépeint Platon, il n’a pourtant pas, malgré ces fréquentations, de grandes aptitudes à la discussion philosophique. Il ne fait l’effet ni d’un philosophe, ni même d’un esprit personnel et vigoureux. En face de Socrate il représente « l’adversaire commode », qui ne se départ guère d’un rôle passif[3]. Il soutient que l’établissement des noms est affaire de convention, mais à la démonstration de Socrate, qui renverse sa thèse, il ne trouve rien à répondre. Il accepte sans discussion l’explication du nom d’Astyanax, avec un empressement qui devance l’interlocuteur ; mais comme Socrate déclare ne pas découvrir encore la raison de cette appellation, Hermogène avoue aussitôt qu’il ne la comprend pas davantage (392 e). Il n’aperçoit pas les faiblesses des raisonnements de Socrate dans la partie étymologique. Il admire de confiance la « savante » étymologie de ψυκή, dont Socrate se moque incontinent. Il s’ébahit naïvement d’apprendre que l’idée du mouvement a déterminé l’attribution des noms aux notions morales : « Je n’y avais point du tout songé », confesse-t-il (411 c). Socrate vient de suggérer une définition du nom : Hermogène se hâte de l’approuver, sans en voir l’insuffisance, qui la fait immédiatement après rejeter par Socrate (423 bc). Il s’émerveille de la vaillance que met son interlocuteur à accumuler les étymologies, mais, après en avoir admis sans observation les procédés et, la plupart du temps, le détail, il acquiesce pleinement à l’impitoyable critique qu’en fait Socrate.

Néanmoins, il n’a pas l’esprit assez obtus pour ne pas sentir çà et là l’extravagance des explications qu’on lui propose. À plusieurs reprises[4] on le voit se récrier sur le caractère étrange et recherché, la complication laborieuse et l’audace des étymologies mises en avant. Il semble entrer à

  1. Cf. Xénophon, Mém., II, 10 ; Banquet, III, 14 ; IV, 47, 50.
  2. 386 a.
  3. Leky, o. l., 14-15.
  4. Voir plus haut, p. 21.