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PHÉDON

sents : ce sont les fidèles dont la présence en un tel jour, aux côtés du Maître, est supposée attendue par Échécrate d’après ce qu’il sait de la composition du cercle socratique. Avec Platon, on doit en outre dans ce double catalogue distinguer les Attiques et les Étrangers[1], ceux qui fréquentent habituellement Socrate et ceux qui ne l’approchent qu’accidentellement à l’occasion de leurs séjours à Athènes, mais qui chez eux se réclament de lui et veulent être, par quelque côté, des « Socratiques ». Enfin, tandis que, en ce qui concerne ces derniers, Platon paraît suggérer (59 c) qu’il a nommé tous ceux qui étaient à nommer, au contraire, pour les Attiques, il indique (ibid. b fin) que son énumération des assistants n’est pas complète ; de fait, bien d’autres noms figurent dans l’Apologie (39 e sq.)[2].

Quels sont, maintenant, ceux dont l’absence a besoin d’être expliquée ? C’est, parmi les Attiques, Platon et, parmi les Étrangers, Aristippe avec Cléombrote. Le premier, dit Phédon (59 b fin), était malade. Qu’il ajoute « je crois », rien n’est dans sa bouche plus naturel : bien loin de suggérer l’idée d’une fiction destinée à reporter sur un autre la responsabilité d’un récit infidèle, c’est au contraire l’affirmation implicite du fait. Malade de chagrin ? Toute conjecture sur la cause de la maladie est inutile ; mais l’absurdité de celle-ci est évidente, si l’on songe à l’analyse, à la fois subtile et forte, que Platon s’est attaché à faire du mélange de douleur et de sérénité qui anime la plupart des assistants[3]. — Quant à Aristippe de Cyrène et à Cléombrote d’Ambracie, ils étaient, disait-on, à Égine. Or Égine était un endroit de plaisir et Aristippe est l’apologiste du plaisir ; il n’en a pas fallu davantage pour supposer[4] que ceux-là n’ont pas voulu sacrifier leurs jouissances, ni compromettre leur tranquillité par un spectacle qui leur eût été trop pénible ! Le blâme serait

  1. Sur ces personnages, voir p. 3, n. 1.
  2. Il est naturel que ni Chéréphon (cf. Apol. 2 c-e sq.), ni Xénophon ne soient nommés : le premier, parce qu’il était mort avant le procès ; le second, parce qu’à ce moment il avait, depuis un an déjà, quitté Athènes pour prendre part à l’expédition de Cyrus ; sur la place de Xénophon dans le cercle socratique, voir mon article de l’Année philosophique, XXI, 1910.
  3. Comparer 58 e sq. avec 117 c sqq.
  4. Diogène Laërce II, 65 et III, 36.