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GORGIAS


e Les choses bonnes et mauvaises.

Socrate. — Existe-t-il une seule chose qui ne soit ou bonne, ou mauvaise, ou neutre, entre le bien et le mal ?

Polos. — Il est de toute nécessité, Socrate, qu’une chose soit l’un ou l’autre.

Socrate. — Ainsi, tu appelles bonnes l’habileté, la santé, la richesse, et autres choses semblables ; mauvaises, celles qui sont le contraire.

Polos. — Oui.

Socrate. — Celles que tu regardes comme n’étant ni bonnes ni mauvaises, 468 ce sont celles qui participent tantôt au bien, tantôt au mal, et parfois sont indifférentes, comme de s’asseoir, de marcher, de courir, d’aller sur mer, ou encore comme le bois, la pierre et les objets de même sorte ? N’est-ce pas ton avis ? Ce que tu appelles des choses neutres, est-ce autre chose ?

Polos. — Non, c’est cela même.

Socrate. — Ces choses neutres, quand on les fait, les fait-on en vue de celles qui sont bonnes, ou les bonnes en vue des neutres ?

Polos. — Les neutres évidemment en vue des bonnes.

b Socrate. — Ainsi, c’est notre bien que nous cherchons dans la marche quand nous marchons, espérant nous en trouver mieux, et quand nous faisons le contraire, c’est encore pour la même fin, pour le bien, que nous restons tranquilles ? N’est-ce pas vrai ?

Polos. — Oui.

Socrate. — De même encore, quand nous tuons un ennemi (si cela nous arrive), quand nous l’exilons ou le privons de ses biens, c’est que nous croyons meilleur pour nous de faire cela que de ne pas le faire ?

Polos. — Assurément.

Socrate. — De sorte que ceux qui accomplissent toutes ces actions les font en vue d’un bien ?

Polos. — Je le reconnais.

Socrate. — Mais n’avons-nous pas reconnu que, lorsque nous faisons une chose en vue d’une autre, la chose voulue n’est pas celle que nous faisons, c mais celle en vue de laquelle nous agissons ?

Polos. — Certainement.