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NOTICE

II

LA DISCUSSION

Socrate résume lui-même très minutieusement, vers la fin de l’entretien (98 c — 99 a), la suite des arguments purement dialectiques d’où s’est dégagée, pour Ménon et pour lui, la conclusion que la vertu ne pouvait être enseignée. Nous ne nous y arrêterons pas : ils ressemblent à ceux qu’on trouve dans d’autres dialogues et ne sont pas exempts de ce verbalisme qui, dans la dialectique socratique et platonicienne, inquiète la pensée moderne. Notons seulement que, dans la première partie du dialogue, dans la recherche d’une définition de la vertu, plusieurs définitions sont tour à tour essayées puis rejetées, et qu’il se dégage de là une intéressante théorie de la définition.

Mais, enseignée ou non, la vertu existe : d’où vient-elle donc ? Elle ne peut venir d’une science proprement dite, car on ne voit personne qui possède cette science. Mais il est une forme de connaissance, une seule, qui, à défaut de la science, peut diriger utilement la conduite de l’homme, comme le fait la vertu : cette chose unique, c’est l’opinion vraie, qui n’a pas la certitude et la solidité de la science, mais qui, en fait et tant qu’elle existe, aboutit aux mêmes résultats pratiques. Or, l’opinion vraie, c’est précisément ce qui fonde la vertu des honnêtes gens et celle des hommes d’État quand ils ne s’égarent pas.

Qu’est-ce donc que l’opinion vraie, et d’où vient-elle à son tour ? Comment l’homme peut-il trouver ou seulement chercher la solution de problèmes relatifs à des choses qu’il ne sait pas encore ? Or il la cherche et la trouve : Socrate le démontre par l’expérience, en faisant trouver à un esclave, qui n’a jamais appris la géométrie, un certain nombre de vérités géométriques. Il a suffi de l’interroger pour l’amener à retrouver en lui-même des souvenirs oubliés : savoir, c’est se ressouvenir ; l’opinion vraie est une réminiscence, et la science est un système d’opinions vraies liées par le raisonnement, et rendues ainsi stables et définitives.

Comment s’explique cette réminiscence ? par la conception pythagoricienne des existences successives que traversent in-