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PROTAGORAS

[ou Les Sophistes, genre polémique.]



UN AMI DE SOCRATE SOCRATE HIPPOCRATE
PROTAGORAS ALCIBIADE CALLIAS
CRITIAS PRODICOS HIPPIAS


Préambule.

L’Ami de Socrate. — 309 D’où sors-tu, Socrate ? Je gage que tu viens de donner la chasse au bel Alcibiade ? À ce propos, je l’ai rencontré l’autre jour, et il m’a semblé un fort bel homme encore, mais un homme, mon cher Socrate, soit dit entre nous, avec toute cette barbe qui lui pousse au menton.

Socrate. — Qu’importe ? Homère, dont tu es l’admirateur, n’a-t-il pas dit[1] que l’âge le plus aimable était celui de la première barbe, l’âge même d’Alcibiade ?

L’Ami. — Soit ; et quelles nouvelles ? Viens-tu de le quitter ? Comment est-il disposé à ton égard ?

Socrate. — Fort bien, à ce qu’il m’a paru, aujourd’hui surtout : car il a beaucoup parlé en ma faveur, pour me venir en aide. C’est d’auprès de lui, en effet, que j’arrive. Je vais cependant t’étonner : malgré sa présence, je n’ai guère fait attention à lui, et j’ai même à plusieurs reprises oublié qu’il était là.

L’Ami. — Qu’a-t-il pu vous arriver à tous les deux de si extraordinaire ! Tu n’as cependant pu, je suppose, rencontrer dans Athènes quelqu’un qui fût plus beau que lui ?

  1. Homère, Iliade, XXIV, 348 ; Odyssée, X, 279.