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SOCRATE.

Ο mon cher Cratyle ! je suis tout le premier à m’étonner de mon savoir, et à m’en méfier. Aussi serais-je d’avis de revenir sur tout ce que j’ai dit pour l’examiner de nouveau ; car, il n’y a pire erreur que celle où l’on s’induit soi-même, puisque alors nous sommes inséparables du trompeur qui nous suit partout. Il convient donc de revenir souvent sur ce que l’on a avancé, et de s’appliquer, comme dit ton poète[1], à voir devant et derrière soi. Ainsi revenons sur ce que nous avons dit tout à l’heure : la propriété du nom, disions-nous, consiste à représenter la chose telle qu’elle est. Tenons-nous cette définition pour vraie ?

CRATYLE.

Assurément, elle me semble vraie, Socrate.

SOCRATE.

Les mots sont donc faits pour enseigner ?

CRATYLE.

Oui.

SOCRATE.

Et ne disons-nous pas qu’il y a un art des noms et des artisans de noms ?

  1. Iliade, liv. I, v. 343 ; liv. III, v. 109.